Le 10 novembre 2006, un article du journal Ouest-France attirait
l'attention évoquant les cérémonies du lendemain (11 novembre) à
ROSNAY : le nom d’Arthur
Sentiment de frustration… l’information sur l’existence de ce célèbre artiste, enfant du pays, nous parvenait de l’extérieur.
Arthur
"Au Fil du Temps" n° 3 de janvier 2007 présentait l’histoire de l’ancienne gendarmerie et la liste des gendarmes ayant eu un poste à Bournezeau. Cette liste nous a fait découvrir le nom de Jean-Baptiste GUENIOT, le père de l’artiste.
Avec l’acte de mariage de ses parents, ses actes de naissance et de baptême, les archives locales nous ont permis de retrouver ses racines. Une recherche aux archives du Conservatoire Départemental des Musées à Roche-sur-Yon nous a donné accès aux chroniques artistiques de "La Revue du Bas Poitou" mentionnant régulièrement la qualité des œuvres du sculpteur à l’occasion de ses expositions annuelles au Salon des Artistes à Paris. Un article très complet sur sa vie et ses œuvres paru en 1966 dans la même revue, pour le centenaire de sa naissance, complète ces informations. L’ensemble de ces documents nous a permis de mieux connaître l’histoire et la personnalité très attachante de ce grand artiste, et d’en informer nos responsables municipaux. Un historique succinct de sa vie et de sa carrière artistique leur a été présenté afin que notre commune honore comme il se doit le nom de ce “Bournevaizien” (Voir la page “Commission Histoire”du bulletin municipal de janvier 2008.)
Arthur GUENIOT est né le 1er mai 1866
" au domicile de Joseph TRENIT ", son grand-père maternel "alors âgé de 62 ans, propriétaire à Bournezeau", nous dit cet acte de naissance signé par-devant le maire Victor GENET, "sur les quatre heures du soir".
Son père Jean-Baptiste GUENIOT, originaire de Haute-Marne, était “gendarme à cheval” à Bournezeau en 1860. Pendant cette période à la gendarmerie locale, il a dû faire la connaissance d’une jeune fille du pays : Joséphine Alzire TRENIT.
Ils se sont mariés le 28 novembre 1860, six ans avant la naissance de l’enfant Arthur. Le maire de Bournezeau était alors Sulpice MALLET, indique l’acte de mariage. Cet acte précise d’entrée que les futurs époux étaient "garçon et fille" et n’avaient donc pas eu précédemment d’autres liens. Il nous apprend aussi que le père d’Arthur GUENIOT, natif de Jorquenay, petit bourg de Haute-Marne près de Langres, avait eu un premier poste de gendarme à Moutiers en Savoie et que son meilleur ami, le gendarme Xavier BRENOT, resté en poste en Savoie, avait fait le voyage pour être son témoin... Jugez de l’effort pour l’époque !
Cet acte nous apprend également que la mère de Joséphine Alzire TRENIT, grand’mère d’Arthur GUENIOT, était née Julie BONNET. Il avait fallu le consentement notarié du père du marié, « manouvrier », qui n’avait pu se déplacer. Le conseil d’administration de la gendarmerie de Savoie avait dû aussi donner son accord.
Quelque temps après son mariage, le gendarme Guéniot fut muté à Belleville-sur-Vie. Lorsque son épouse fut "en espoir de famille", comme l'on disait alors, elle désira que la naissance de son enfant se fit à Bournezeau près de sa mère. Elle vint au domicile de ses parents pour accoucher.
La maison natale d'Arthur
Il fut baptisé dans l'ancienne église "le jeudi 3ème
jour du mois de mai 1866">par le vicaire Aristide
Disparu il y a seulement 57 ans, Arthur GUENIOT était un artiste de valeur dont l'œuvre nous est mal connue. Prolifique, il est l'auteur de très nombreux dessins et peintures et de plus de 200 sculptures. Une vingtaine de ses oeuvres existent en Vendée.
Arthur GUENIOT est donc un vrai Bournevaizien : né à BOURNEZEAU, d'une mère originaire de BOURNEZEAU
Dés l'âge de 7 ans, il se faisait remarquer à l'école par la richesse de ses dessins et s'appliquait déjà à modeler la terre glaise, prémices de ses futurs talents de sculpteur. Il passa 5 années dans une pension sévère à Montlieu en Charente où ses parents l’avaient mis dès l’âge de 11 ans. Sa santé le supporta mal. Son tempérament sensible et délicat lui faisait apprécier la vie familiale, avec son frère aîné Aristide et ses deux sœurs, Marguerite et Léa. Il a été très affecté par la mort prématurée de ce frère ainé, âgé de 18 ans: "Toute séparation emporte un lambeau de moi-même"écrivait-il plus tard. A cette époque ses parents avaient quitté la Vendée pour s’installer dans la petite cité médiévale de Riom, en Gironde. (Ils reviendront en Vendée quelques années plus tard pour habiter La-Roche-sur-Yon).
Par ses études chez les Pères Maristes de Riom, il fut initié à l'art et l'architecture. Leur influence lui a fait consacrer une grande partie de ses oeuvres à l'art religieux.
En 1889, à 23 ans, il est admis au concours de l'École des Arts Décoratifs de Paris où il est remarqué par la qualité de ses travaux. Il obtint à cette époque un "Premier Prix de Portrait" à Clermont-Ferrand, pendant son service militaire. Poursuivant ses études à Paris, il décrocha un certificat de professeur de dessin, mais refusa plusieurs postes, car il se sentait davantage attiré par les Beaux-Arts.
1892 fut une étape importante pour son art : le
célèbre maître Gustave MOREAU le prit comme élève. Il avait 26 ans, et eut
alors pour condisciples
Une autre fois, ״
Il quitta l’école en 1896 avec un premier prix de dessin, après avoir déjà réalisé un bon nombre de toiles de qualité et plus de 80 dessins où s’affirmait son talent. Se jouant des difficultés dans les “anatomies”, il savait faire jaillir sur les visages la vie intérieure, caractères que l’on retrouve souvent dans ses sculptures.
En 1897, il avait 31 ans et profita du passage en Vendée du Président de la République Félix FAURE pour se faire connaître. Il adressa au préfet de la Vendée le tableau ci-dessous intitulé ״Chasse Antique", autant en hommage à sa terre natale que pour essayer de faire valoir la qualité de sa production artistique.
La même année, ses anciens professeurs, les religieux Maristes, lui
confièrent la décoration de l'église française du Rosaire à Rome, montrant
ainsi l'estime qu'ils portaient à ses compétences. Sur place, il en
profita pour se faire de très nombreuses et utiles relations, comme le
sculpteur
En 1899 il revint en France, à La-Roche-sur-Yon où habitaient alors ses parents. Lui, plutôt versé dans le "dessin-décoration", reçut la commande de sa première statue de la part de l'archiprêtre de l'église St Louis. C’était la preuve de sa renommée naissante. Ce sera aussi une bonne leçon de persévérance pour le jeune artiste. Sur place, “squattant” la salle à manger de ses parents, il prépara son œuvre, modelant le personnage sur une armature. Satisfait, elle était presque achevée, lorsque la nuit suivante gros fracas : l’œuvre était à terre. Seule la tête du saint restait en haut de l’armature que le débutant en sculpture avait sans doute mal conçue. Il se ressaisit alors et s’armant de courage, ne ressortit de la pièce qu’une fois la statue achevée.
La qualité du St François d'Assise réalisé l'encouragea à poursuivre. Ce fut un tournant pour son art, et le début d'une prolifique carrière de sculpteur ! A partir de 1900, les sculptures se sont succédé presque sans interruption. Arthur GUENIOT installa son atelier à Paris, 65 rue de Longchamp. Il a réalisé alors un premier buste de sa mère.
De tempérament plutôt solitaire et mélancolique, c’est à cette époque qu’il a rencontré à Paris, grâce à des amis, Anne LARERE, "Bretonne de grande distinction", issue d'une famille très connue de la région de Dinan, où ils se sont mariés le 15 mai 1901. Par la suite, il revint souvent dans la région. Il avait une villa à St Briac.
De cette union sont nés 4 enfants : un garçon, Jean, et trois filles, Marguerite, Madeleine et Agnès. Ils furent plusieurs fois ses modèles pour des bustes. Chez un sculpteur, cela remplace les photos de famille !
Ce mariage eut une grande influence sur son comportement : "Je suis plus gai, plus intelligent, presque spirituel, les jours où je suis surpris par les attaches d'affection et où ma pensée est captivée par un idéal féminin"disait t-il.
Cette année là, il exposa pour la première fois au "Salon des Artistes
Français", à Paris, et réalisa de nombreux bustes, dont celui de son père,
le gendarme
En 1902, la ville de Montaigu lui commanda la statue en bronze
du colonel
L’une de ses premières réalisations en marbre “Rêverie”(statuette de
jeune fille) fut primée en 1905. Achetée par la ville de Paris,
elle se trouve au musée de Saint Maur des Fossés. La qualité de l’œuvre
fut telle que la Manufacture Nationale de Sèvres acheta le modèle et en
fit une quarantaine de réductions en porcelaine, commercialisées jusqu’en
1928. Un moulage de l’œuvre existe au musée de Fontenay, dédicacé à son
ami
1906, année sombre. Sa vie familiale heureuse durant cinq années fut brusquement meurtrie par le décès de sa chère épouse. Cette séparation le plongea dans la mélancolie et il confiait que ״que tout départ d'un être cher est une mort dont je souffre le chagrin torturant". Mais veuf, avec quatre enfants, il reprit courageusement son activité artistique et s'y consacra de plus en plus.
En 1910, il réalisa pour la ville de Dinan la statue en bronze du
célèbre Breton "Jehan
Vers 1915, il exécuta pour l'église St Jean l’Evangéliste de Montmartre deux bénitiers monumentaux en marbre de Carrare, représentant chacun un ange de 2,20 m de haut versant l'eau d'une cruche, pièces remarquables par leur sereine fraîcheur.
Il a fait un nouveau buste de sa mère en 1918. Elle a alors 83 ans. Ce
bronze fut exposé au salon de 1921 et une épreuve existe au Musée de
Fontenay le Comte. Il s’y trouve aussi un buste de son ami
En 1920, le 31 octobre, fut érigé à ROSNAY le monument aux Morts, déclencheur de nos recherches. “Femme à la stèle”, veuve inspirée de l'antiquité, cette oeuvre empreinte de calme et de sérénité est caractéristique de l'art d’Arthur GUENIOT. A cette époque, il réalisa en France une douzaine d’autres monuments aux Morts de la guerre 14-18, dont en Vendée St Florent-des-Bois, Champ-St-Père, Le Poiré-sur-Velluire...
En 1925, il exécuta pour le Québec un groupe représentant les premiers pionniers, exposé à San-Francisco.
Son œuvre se poursuivit par de multiples bas-reliefs et statues de saints : St Joseph, St Jean l'Evangéliste, St Antoine de Padoue, Ste Thérèse etc..., et de nombreux autres sujets qui pouvaient être imaginaires ou représentatifs de personnalités. Il utilisait aussi bien le plâtre ou le bronze que le marbre ou la pierre. Sa famille et ses amis inspirèrent également souvent ses travaux.
En 1927, il reçut la médaille d'or du Salon des Artistes français pour un pathétique St François d’Assise que l'on peut voir dans l’église du S.C. de Dijon. Il obtint la distinction de Chevalier de la Légion d’Honneur en 1929. Mais il n'oublia pas la Vendée et vint exposer à La Roche sur Yon cette même année.
Vers la fin de sa période la plus active, trois de ses oeuvres importantes arrivèrent en Vendée:
- 1934, le Roi St Louis tenant la Couronne d’Epines du Christ, (sous le péristyle de l'église St Louis à la Roche sur Yon ).
1936, la statue de St Philbert, bronze de 2,40m de haut, à Beauvoir sur Mer.
1938, pour l'église de la Garnache, un Christ en bois grandeur nature, sculpté dans une poutre en chêne datant de 1620, oeuvre "empreinte de sobriété sans artifice", dit le chroniqueur. Il y eut aussi à cette époque pour le collège St Gabriel de St Laurent sur Sèvre un bienheureux Grignon de Montfort.
Les archives municipales gardent le souvenir de son passage à Bournezeau en1941, où il fut inscrit pour une carte alimentaire. Durant la dernière guerre mondiale, il était venu se ressourcer en Vendée où se trouvaient ses sœurs. Cette époque l'avait énormément troublé et il quitta à nouveau sa terre natale.
Il a passé son dernier hiver à Vitry-le-François dans la Marne, terre
d'origine de son père, où il décéda le 16 février 1951, laissant une
oeuvre considérable, dont une grande part, notes, dessins, tableaux,
modelages, sculptures, venant de son atelier parisien, fut préservée et
rassemblée par son gendre, M.
Le plus bel éloge fut celui de son ami
Artiste renommé d’une grande valeur humaine, Bournezeau se doit d'honorer son souvenir..