Déraillement d’un train en 1944

Vers le 15 août 1944, les habitants de Bournezeau étaient intrigués par les manœuvres des Allemands qui essayaient de cacher un convoi de marchandises dans les tranchées étroites de la voie ferrée. Le convoi se serait caché deux ou trois jours près du Bois-Bonneau, puis se serait déplacé pour quelques jours près du viaduc de l’Angle. Ou bien, d'après un autre témoignage, le convoi aurait été coupé en deux : une partie au Bois-Bonneau et l’autre près du viaduc.

Le convoi se serait également arrêté au Pont-Briquet. Les habitants se demandaient ce que pouvaient contenir tous ces wagons que les Allemands avaient couverts de branchages. Des sentinelles allemandes armées étaient présentes autour de la tranchée et empêchaient les habitants d’approcher. Il ne faisait pas bon regarder du pont routier de l’Angle : les Allemands tiraient à vue ! Un témoin affirme également avoir été mis en joue lorsqu’il faisait le curieux sur le Pont du Bois-Bonneau.

A cette période, le moral des troupes allemandes était mauvais. Sentant la défaite, un officier qui discutait en pleurant avec un homme de Bournezeau, disait sa crainte de ne pouvoir rejoindre l’Allemagne vivant.


Dans la nuit du vendredi 18 au samedi 19 août 1944, ce convoi s’engagea sur la voie ferrée de Chantonnay à Fontenay. Il s’arrêta à la gare de Pareds (commune de La-Jaudonnière) pour se ravitailler en nourriture. Puis, il se dirigeait à faible allure en direction de la Caillère quand, soudain, à 0h15, lorsqu’il franchit le pont de Frogère de St-Hilaire-du-Bois, on entendit un bruit énorme de ferrailles qui s’entrechoquaient, de sifflements de jets de vapeur, d’explosions de grenades, de crépitements d’armes automatiques. Le train venait de dérailler.


Le pont de Frogère

Les Allemands craignaient une éventuelle attaque des Forces françaises de l’Intérieur (FFI) qui étaient très actives en cette période de 1944.

La destination de ce convoi n’était pas trop connue, mais il semblerait qu’il regagnait la fameuse poche de La-Rochelle où les Allemands se retranchaient.

Le train allemand transportait une grosse pièce d’artillerie de marine de 240 millimètres. L’ensemble dépassait 20 mètres et pouvait peser 70 tonnes. Il y avait aussi un wagon lourdement chargé d’obus et deux wagons à bestiaux transportant environ 50 hommes. Une draisine fermait la marche. L’ensemble était tiré par deux locomotives avec leurs tenders.

Lors de ce déraillement, trois hommes furent tués : deux chauffeurs français et un chauffeur polonais de l’armée allemande, affreusement brûlés par la vapeur lors du renversement des deux locomotives et de leurs tenders. Dans un premier temps, ils ont été transportés chez M. Bontemps, garde-barrière à la maisonnette de la Tapusse, distante d’environ 500 mètres, puis on les retrouva à la gare de la Caillère où ils ont pu être identifiés. Le Polonais aurait été enterré sur place puis exhumé et transporté dans son pays en 1945.

La tension était vive. Les Allemands parlaient de prendre des otages à St-Hilaire-du-Bois. Georges Bourgouin, (fondateur de l'entreprise Bourgouin qui est venue s'installer à Chantonnay en 1960 et à Bournezeau en 2006) mécanicien entrepreneur à la Caillère, est allé sur place pour tenter d’accréditer la version selon laquelle, l’équipement ferroviaire était trop faible pour le passage d’un tel convoi, mais les Allemands croyaient plus à un acte de sabotage des rails. La population des communes avoisinantes (La-Caillère, Bazoges et St-Hilaire-du-Bois) a eu très peur des représailles allemandes. Cet évènement aurait pu avoir de graves conséquences.

Dans la semaine qui suivit le déraillement, les Allemands ont fait sauter la grosse pièce d’artillerie, pour la rendre inutilisable. Les obus ont aussi été détruits par des artificiers dans la carrière de St-Hilaire-du-Bois. Les Allemands ont quitté définitivement la Vendée le 21 septembre 1944.

Henri Rousseau

Note : La mise en place de la voie ferrée Chantonnay\ Fontenay s’est faite en 1900, l’activité de cette voie a pris fin vers 1954.
 Sources :
Article de Charles Antoine VERLY, sur le bulletin de l’association Histoire et Patrimoine du canton de Ste-Hermine : Entre Smagne et Arkanson. Témoignages de René Charrier, Maurice Selin, Alcide Jaulin et René Bély de St-Philbert-de-Pont-Charrault pour la recherche du lieu de l’accident.