Le curé Chancelier, mobilisé en 1914

Léon Auguste Chancelier est né le 15 janvier 1877 à Bazoges-en-Paillers. Il était l’aîné et avait un frère et 2 sœurs. Pendant la guerre de 14-18, il était curé de St. Vincent Puymaufrais. Mobilisé d’août 1914 à janvier 1919, bien qu’absent pendant quatre ans et remplacé par l’abbé E. Charrier, professeur au collège Richelieu, il est resté soucieux de ceux qu’il considérait toujours comme ses paroissiens.

  Le Conseil de Révision

  La fiche matricule renseignée lors du Conseil de Révision suivait l’appelé tout au long de sa carrière militaire. Celle d’Auguste Chancelier retrace ses relations avec l’armée de 1897 à 1923.

   Loi de recrutement de 1889
   Art. 23 : En temps de paix, après un an de présence sous les drapeaux, sont envoyés en congé dans leurs foyers, sur leur demande, jusqu’à la date de leur passage dans la réserve :
   4. Les jeunes gens admis, à titre d’élèves ecclésiastiques, à continuer leurs études en vue d’exercer le ministère dans l’un des cultes reconnus par l’état.
  Quand il a été convoqué à Saint-Fulgent en 1897, reconnu propre au service, il en a été dispensé en tant qu’élève ecclésiastique : Le 26 janvier 1900, il renonça à cette dispense et demanda à être dispensé en tant qu’aîné d’orphelins de père et mère. Son frère n’avait alors que 14 ans.
   Art.21 : En temps de paix, après un an de présence sous les drapeaux, sont envoyés en congé dans leurs foyers, sur leur demande, jusqu’à la date de leur passage dans la réserve : 1. L’aîné d’orphelins de père et de mère,

 

  Avant la guerre

  Comme tous ceux de sa classe, il est passé dans la réserve de l’armée active le 1er novembre 1901.

Entête du recueil de fiches matricules de la classe 1997

   En 1902, il devint vicaire à St. Philbert de Bouaine et le 22 juillet, il fut dispensé d’exercices militaires (vicaire rétribué par l’état, c’était avant la séparation de l’Église et de l’État). Il a été ensuite vicaire à Noirmoutier en 1906, puis à Fontenay-le-Comte en 1911. Enfin il a été nommé curé de St-Vincent-Puymaufrais le 17 décembre 1912.
  Il était affecté à la 11ème section d’infirmiers dans l’infanterie territoriale.
 Par la voix de l’Officiel, M. Millerand, a répondu à un député :

 Les ecclésiastiques des divers cultes appartenant aux classes régies par la loi du 15 juillet 1889, […] sont affectés de droit en cas de mobilisation, au service de santé.


C’est ce que rappelait le bulletin paroissial de Saint-Vincent-Puymaufrais en août 1915.
En 1907, Auguste Chancelier a accompli une période d’exercices dans cette 11ème section d’infirmiers, du 28 janvier au 24 février.


Extrait de la fiche matricule militaire

 

  Pendant la guerre

Le parcours d'après sa fiche matricule militaire


 Le 1er août 1914, il fut rappelé à l’activité. Il arriva au corps le 9 août. Le bulletin paroissial parlait de ce départ en septembre :

 Refoulant et dissimulant ses propres peines, M. l’abbé Chancelier s’est efforcé avant son départ d’encourager autour de lui les cœurs abattus, et, le jeudi 6, il répondait à son tour à l’appel du devoir. Son rôle sera celui du dévouement, obscur peut-être, mais méritoire et vraiment digne du prêtre, le rôle de l’ami, du frère qui relève l’infortune blessé, le console, panse les blessures de son corps et apporte à son âme les secours divins, le rôle enfin de l’ange de charité. Toute la paroisse a prié et continuera de prier pour que le bon Dieu protège et ramène à St-Vincent-Puymaufrais celui qui n’oublie pas sa chère paroisse et qui écrivait récemment : « Union de prières avec mes paroissiens : courage et sacrifice ! »

 Le bulletin a donné des nouvelles en octobre 1914 :

   M. l’abbé Chancelier, à qui toute la paroisse témoigne une particulière sympathie, est depuis la fin du mois d’août affecté comme infirmier à un hôpital temporaire de Vannes. Tout en donnant à nos chers blessés ses soins dévoués, en même temps que les consolations surnaturelles de son ministère sacerdotal, il n’oublie pas cependant ses paroissiens : « Je prie souvent pour eux tous, m’écrivait-il récemment, et je demande au Bon Dieu de les épargner au milieu des cruelles épreuves. »

Le 14 mars 1916, après un passage à Nantes, puis à Limoges, il était brancardier sur le front. Les bulletins donnaient des nouvelles.
 Mais le soir du 1er mars, il était habillé tout à neuf pour partir. Il est parti le lendemain, à 3 heures, pour Limoges et de Limoges pour une direction inconnue, avec une centaine d’infirmiers, parmi lesquels de nombreux prêtres vendéens.

 Il avait projeté de venir un de ces dimanches à Puymaufrais. Les projets sont défaits. Quand le reverrons-nous ?
 Au sein de ses pérégrinations militaires, il n’oublie point ses chers paroissiens : il est avec tous par la pensée et par le cœur ; avec tous, il réclame l’union, dans la prière et le sacrifice.
 Continuez de garder son souvenir comme il garde le vôtre, et priez pour lui comme il prie pour vous.
 Depuis la mi-mars, Monsieur le Curé est parti de Limoges. Actuellement, il est en arrière du front, s’exerçant à la pénible mission de brancardier, et faisant un peu de tout. Tout le monde sera content de trouver ici sa nouvelle adresse. La voici :
 Monsieur Auguste Chancelier, infirmier, 11e section G. B. C. – Secteur Postal N° 180.
 Il ne vous oublie pas, comme en fait preuve sa dernière lettre du 26 mars, que je vous cite en partie :
 « Cher ami, comme vous le dites si bien dans le dernier bulletin que j’ai reçu vendredi, je suis toujours par la pensée au milieu des paroissiens, partageant leurs peines. Et avec eux, je désire ardemment la fin de la guerre. La victoire viendra certainement, dit-on, cette année ; et si le Bon Dieu le permet, le Curé sera rendu à sa paroisse, les membres à leur famille. Mais il faudra encore souffrir…
  « Aucun changement dans ma vie militaire Hier, un avion, mais français celui-là, est venu nous rendre visite.
 Le temps s’est un peu refroidi. D’abord temps doux ; puis temps pluvieux ; actuellement temps froid. Hier, nous avons fait des travaux d’assainissement dans la localité que nous habitons ; autrement dit, nous avons fait l’office du cantonnier.
 « Aux familles dernièrement éprouvées offrez mes condoléances, et dites-leur que je prie pour leurs chers défunts.
 « Bonjour à tout le monde, et avec tous union de prières. »

 Et en juin 1916, il espérait une permission pour rejoindre ses paroissiens :

 Toujours à la 11ème section G. B. C., secteur 180. Sa santé est toujours bonne. Peut-être va-t-il quitter le pays où il se trouve, pour aller ailleurs. Il compte un peu sur une permission dans la seconde quinzaine du mois. Il n’oublie personne, pense à tous, particulièrement aux malades à qui il souhaite meilleure santé, et aux familles éprouvées à qui il envoie ses sympathies.


 

 Après la guerre

 
 Il a été démobilisé le 25 janvier 1919. Il est retourné à Saint-Vincent-Puymaufrais jusqu’en 1924. Il a ensuite été curé de Fougeré jusqu’en 1947.
 Puis il a vécu les dernières années de sa vie dans la famille de son frère, à Saint-Hilaire-de-Voust.
 Des ruches étaient installées sous une pergola de vignes. Grand amateur d’apiculture, de jardinage, de champignons, il marchait beaucoup, curieux de la nature, des oiseaux. Bernard Chancelier se souvient des promenades où il l’accompagnait. Il se laissait guider par cet observateur averti des plantes et des animaux.
 Auguste Chancelier est décédé le 26 mars 1955 à Saint-Hilaire-de-Voust.
 

 
Auguste Chancelier vers 1947

 

 Sources :
 Informations recueillies auprès de Bernard Chancelier dont c’est le grand oncle.
 Fiche Matricule Militaire aux archives de Vendée
 Bulletins Paroissiaux de Saint-Vincent Puymaufrais aux archives de Vendée